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L'effet du gel sur la vigne

Le gel est un phénomène naturel aléatoire qui, avec le changement climatique, peut s’avérer dévastateur. Si les gelées hivernales sont principalement impactantes sur les jeunes vignes, les gels de printemps peuvent avoir des conséquences néfastes sur la production en cours. Comprendre les différents types de gel et les dégâts qu’ils peuvent provoquer incite fortement à s’orienter vers des moyens de prévention.

Quels sont les différents types de gelées ?

Les gelées peuvent apparaître à différents moments de l’année et elles n’ont pas le même impact en fonction du stade phénologique de la vigne. Il existe plusieurs types de gelées répartis selon les saisons :

  • En automne, on parle de gelées précoces.
    • Si la température passe sous les -2.5°C, les jeunes vignes, dont les feuilles ne sont pas encore tombées, sont impactées. En effet, leur cycle végétatif est plus long et cette perte précoce des feuilles affaiblira la jeune vigne pour l’année suivante et impactera sa production.
    • Ces gelées vont aussi déclencher la mise en dormance prématurée des autres vignes, et les plantes vont présenter un mauvais aoutement du bois si elles n’avaient pas accumulé assez de réserves.

  • Les gelées d’hiver peuvent être fatales pour la vigne, même si elle y est moins sensible car en dormance. Sous -15°C, ces gelées touchent tous les organes de la vigne et peuvent provoquer sa mort. Cependant, si la chute des températures est progressive, la vigne supportera mieux le gel. La situation à craindre pour les viticulteurs est qu’un hiver doux provoque une reprise prématurée de la vigne qui va débourrer ; s’il y a un soudain retour au froid, des dommages importants, comme la destruction des bourgeons ou la nécrose de certaines branches, vont apparaître. Il est nécessaire de cultiver des cépages plus ou moins résistants au froid selon la zone d’implantation : une réflexion à mener en amont de la plantation de nouvelle parcelle de vigne.
  • Les gelées de printemps sont à l’origine des dégâts directs sur la production de raisin en cours : la vigne a repris son cycle végétatif et les gelées sous -2°C peuvent nuire au rendement plus qu’à la pérennité de la plante. Selon le stade de la vigne au moment du gel, les dégâts sont variables. Ces gelées, au nom révélateur de leur apparence ou des dégâts occasionnés, vont prendre la forme :
    • De gelées blanches : une fine pellicule blanche de glace se forme par température entre -3 et -5°C. Les jeunes pousses peuvent être plus ou moins atteintes selon l’intensité du gel. Ces gelées blanches se rencontrent surtout dans les zones humides ou les bas coteaux, où l’air immobile, refroidi par temps clair par rayonnement et ainsi plus lourd, s’amasse.
    • De gelées noires ou gelée par convection : elles correspondent à une arrivée massive d’air froid et sec, pouvant atteindre plusieurs mètres d’épaisseur, généralement la nuit, à une température moyenne de -7 à -9°C. Dans cette atmosphère sèche, souvent associée à du vent à l’effet dessiccant, les jeunes poussent peuvent alors être totalement détruites et la perte des récoltes peut être importantes.

Quels impacts du gel de printemps sur la vigne ?

Selon la température atteinte pendant le gel, la mort de la souche ne sera pas systématique. Mais des dégâts sont tout de même à craindre :

  • Les sarments vont se dessécher avec l’apparition d’un liber brun ou gris. Les extrémités des rameaux vont être plus sensibles et également se flétrir et se dessécher : organes porteurs des inflorescences, leur destruction entraine mécaniquement une perte de récolte.
  • Les bourgeons primaires vont prendre une coloration marron et être moins productifs ou morts. Ces bourgeons portant généralement 2 grappes, leur destruction entraine donc une perte de récolte. Cependant, des bourgeons secondaires peuvent progressivement apparaître et de nouveaux rameaux vont pouvoir se développer.

  • Ce phénomène de compensation permet de pallier, dans une certaine mesure, à la perte du potentiel de vendange, mais rend la détection des dégâts réels difficiles à observer.

Les aléas climatiques liés au gel de printemps impactent donc de manière significative l’équilibre financier des exploitations viticoles. D’après l’Agreste, le service statistique du ministère, les gelées d’avril 2021 vont faire chuter la production de l’ordre de 25 % inférieure à la moyenne des récoltes des cinq dernières années, soit plus basse encore que les années 1991 et 2017, elles même impactées par ces aléas climatiques.

A l’échelle de la filière, les gels de printemps ont des conséquences sur l’approvisionnement en vin de France sur le marché intérieur, ce qui favorisera les importations de vins d’autres pays en Europe

Comment protéger la vigne contre les gels printaniers ?

Anticiper le risque dès la plantation

Les mesures de lutte sont appliquées avant le risque de gel et parfois dès la plantation. C’est ainsi qu’elles sont les plus économiques et les plus efficaces.

  • Bien choisir sa parcelle : il faut éviter de planter sa vigne dans des zones gélives ou les fonds de vallon. La présence de haies ou de bandes boisés qui bloquent le brassage de l’air froid augmente également le risque de gel.
  • Les pratiques culturales ou agronomiques : le choix de cépages adapté à notre parcelle et à notre milieu est important (s’il y a un risque de gelée précoce, on privilégie des cépages à aoutement précoce) ; éviter une taille tardive qui retarde le débourrement permet de réduire l’impact du gel sur la vigne.
  • Souscrire une assurance récolte qui inclut le gel et la grêle si c’est un phénomène climatique fréquent sur ses parcelles.


Mettre en œuvre des mesures de protection directe

Ces mesures sont déployées juste avant ou pendant la période de gel.

  • Le buttage ou chaussage des vignes : cette méthode consiste à recouvrir de terre les pieds de ceps de vigne, notamment pour lutter contre les gelées d’hiver.
  • L’aspersion d’eau : l’objectif est d’arroser la vigne en continue pendant la période de gel pour que les bourgeons et les organes herbacés ne gèlent pas. C’est néanmoins une pratique consommatrice d’eau et qui va s’appliquer principalement aux parcelles les plus exposées.
  • L’utilisation de chauffage (bougies, chaufferettes) : elles sont utilisées pour réchauffer l’air et limiter la perte de chaleur du sol quand les températures ne sont pas encore trop négatives. C’est cependant une mesure polluante et qui nécessite beaucoup de main d’œuvre.
  • Le brassage d’air : de l’air est brassé afin de remplacer la couche d’air froid inférieure par la couche d’air plus chaud supérieure à 10 ou 12 m de hauteur. Cette mesure est cependant coûteuse et bruyante car elle nécessite l’utilisation d’hélicoptères ou d’éoliennes. En outre, cette pratique ne doit pas être utilisée lors de de gelée noire au risque d’augmenter encore les dégâts en favorisant la convection.


Si le gel a sensiblement affecté votre vigne, les moyens curatifs sont limités.

Il convient toutefois d’avoir une attention particulière aux parcelles touchées afin de maintenir la plante dans le meilleur état physiologique possible.

  • Des apports nutritifs peuvent soutenir des vignes peu vigoureuses pour les aider à passer le cap.
  • Dans tous les cas, le maintien d’une protection rigoureuse contre les bioagresseurs est vivement conseillée. En effet, le pied affaibli par le gel pourra être plus sensible aux attaques de maladies et ravageurs ; un relâchement de la protection peut compromettre la vendange restante mais également avoir un impact à long terme si la pression devient trop forte.

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