Résistance aux produits phytosanitaires : de quoi parle-t-on ?
La résistance des bioagresseurs (maladies, adventices, ravageurs) à certains produits phytosanitaires est un sujet de préoccupation majeur pour tous les professionnels de l’agriculture. Pour prévenir et gérer le développement des résistances, il est essentiel de bien en connaître les mécanismes.
Les enjeux pour aujourd’hui et pour demain
- Plusieurs familles de produits ont été, et seront, interdites au fil des révisions successives des substances actives ;
- L’innovation en matière de modes d’action est de plus en plus difficile ;
- Les critères d’homologation de nouvelles matières actives sont de plus en plus complexes.
L’enjeu de la lutte contre les résistances est de préserver sur le long terme l’efficacité et la diversité des solutions de protection des cultures proposées aux agriculteurs.
Cependant, les pressions réglementaires constituent un frein parmi tant d'autres au renouvellement du portefeuille et les mesures de bonnes pratiques phytosanitaires sont essentielles pour maintenir l’efficacité des solutions existantes.
Pour ne pas aboutir à des impasses, il est donc essentiel que les différents acteurs de la filière agricole mettent en place de manière concertée des stratégies de protection des cultures intégrant la prévention et/ou la gestion des résistances.
La résistance : une caractéristique naturelle
Une population d’une espèce donnée n’est pas un système homogène et figé mais un ensemble d’organismes vivants présentant une grande diversité. Cette diversité se traduit par une variabilité des caractères de l’espèce. Certains de ces caractères confèrent aux individus qui les possèdent un avantage compétitif sur leurs semblables. C’est par exemple le cas du caractère « succès de reproduction ». Ou, pour le sujet qui nous intéresse, du caractère « sensibilité » à un produit phytosanitaire. La résistance est, dans ce cas, la capacité - naturelle et transmissible - de certains individus à survivre à l’exposition à ce produit, lequel, s’il est correctement appliqué, permet le contrôle efficace du reste de la population.
Effet de la pression de sélection
Comment expliquer que des populations entières de microorganismes pathogènes, d’adventices ou de ravageurs soient résistantes à telle ou telle substance active ? Ce résultat s’explique par la pression de sélection exercée par des applications répétées d’une même matière active / d’un même mode d’action fongicide / d’un même produit : ce mécanisme favorise progressivement les individus peu ou plus du tout sensibles à ces produits au détriment des autres.

L’exemple du mildiou de la vigne
Le mildiou de la vigne est le résultat d’une infection provoquée par un microorganisme assimilé à un champignon : Plasmopara viticola.
Les spores de la population de Plasmopara viticola présentent de façon naturelle une variabilité de leur sensibilité à une matière active fongicide donnée (schématisation par des spores de couleurs différentes allant du bleu foncé au jaune). C’est ce que nous appelons la sensibilité de base, matérialisée au laboratoire par la « ligne de base ». Parmi l’ensemble de ces spores, une spore résistance - schématisée en rouge - est présente en fréquence très faible dans la population.

Présentes en très petit nombre au départ, les spores résistantes vont peu à peu se développer au détriment des plus sensibles par le jeu de croisements génétiques sous l’effet des applications répétées d’un même mode d’action fongicide.