Face au vulpin, les agriculteurs anglais sont dans l’impasse

Outre-Manche, la totalité des surfaces cultivées sont concernées par un problème de résistance du vulpin aux herbicides. Comment en est-on arrivé là ? Quelles solutions pour sortir de cette situation ? Les explications de Stephen Moss, expert vulpin et conseiller auprès des instituts techniques et des centres de recherche britanniques.

C’est le scénario que tous les agriculteurs français redoutent : se retrouver dans l’impasse de leurs confrères britanniques face à l’invasion d’adventices résistantes aux herbicides, et spécialement du vulpin. « En Angleterre, aucune ferme n’est épargnée par la résistance du vulpin, assure Stephen Moss. Dans certains cas, le coût du désherbage grimpe à 200 euros par hectare. »


Comment en est-on arrivé là ?

Des causes du phénomène sont multiples

Premier facteur, les rotations. En quarante ans, les céréales d’hiver et le colza, cultures les plus rémunératrices, se sont imposés outre-Manche, rendant le désherbage plus compliqué. Entre 1974 et 2014, les surfaces de colza ont ainsi été multipliées par… 27 !
« Dans les années 80, on considérait que le colza était idéal pour contrôler les mauvaises herbes, car on disposait de plusieurs solutions herbicides », se rappelle Stephen Moss. De fait, les agriculteurs alternaient les molécules mais pas forcément les modes d’action, ce qui a contribué à émousser leur efficacité.
Aujourd’hui, 70% des cultures sont hivernales.

Deuxième facteur, l’abandon des pratiques agronomiques (labour, faux-semis, introduction d’une culture de printemps, décalage de la date de semis…), au profit d’un désherbage purement chimique.

Dernier facteur, la précocité des dates de semis, qui augmente le nombre de passages herbicides. « En 1975, 5% des blés étaient semés en septembre, aujourd’hui, cela concerne la moitié des surfaces », constate Stephen Moss.
Avancer la date de semis des céréales d’hiver, on le sait, permet d’intervenir dans des sols ressuyés et d’obtenir un meilleur rendement. Mais les rotations restent courtes. Le résultat, on le connaît : la colonisation des surfaces cultivées par des vulpins résistants aux inhibiteurs de l’ALS et/ou aux inhibiteurs de l’ACCase.


Comment sortir de l’impasse ?

Dos au mur, les agriculteurs anglais ont fini par écouter les conseils que techniciens et experts leur prodiguaient depuis des années. Ils se sont mis à introduire des cultures de printemps et ont décalé leurs semis d’hiver d’un mois, en octobre.

Parmi les cultures de printemps adaptées aux conditions pédoclimatiques anglaises, Stephen Moss préconise l’orge, pour deux raisons : « C’est la plus rémunératrice des céréales, et les herbicides homologués sont plus nombreux que pour le blé de printemps. »
Autre mesure agronomique, le labour : une mesure très efficace, selon Stephen Moss, à condition qu’elle soit bien pratiquée. On déplore en effet de nombreux échecs dus aux couches du sol mal inversées.

Dans ce contexte, pas question d’espérer se débarrasser des vulpins du jour au lendemain. « L’objectif est de ne pas perdre plus de 5% de rendement », précise Stephen Moss. Pour cela, il faut ramener la densité de vulpins à moins de douze plants par mètre carré. « Les agriculteurs doivent apprendre à repérer les ronds de vulpins et effectuer des traitements localisés année après année. »

Mais le principal pour remporter la bataille contre les adventices résistantes, rappelle Stephen Moss, c’est la formation des agriculteurs aux pratiques agronomiques et à la gestion des modes d’action herbicides.

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Intensité des résistances, rotations, semis, pratiques agronomiques : comment s’y prend-on de part et d’autre de la Manche pour regagner du terrain face au vulpin ? L’avis de Benjamin Gicquel et Géraldine Bailly, nos experts BASF en désherbage.

Richard Hinchliffe, est agriculteur dans le comté de Yorkshire and The Humber, en Angleterre ; Edouard François, est agriculteur dans l’Eure-et-Loir, en France. Ils nous présentent leurs solutions pour réduire la pression du vulpin dans leurs parcelles de céréales.

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