Septoriose sur blé : résistances et pression de sélection compliquent la lutte
La résistance de la septoriose du blé progresse et complique la protection de la céréale. Les solutions disponibles doivent, en parallèle, faire face à la pression réglementaire et sont de moins en moins nombreuses. Des précautions s’imposent pour bâtir les programmes fongicides. Il ne s’agit plus seulement de penser en termes d’efficacité mais aussi de maintien de celle-ci.
La note commune rédigée par l’Inra, l’Anses et Arvalis-Institut du végétal, a mis une nouvelle fois en avant, dans son édition 2019, une progression de la résistance de la septoriose aux fongicides utilisés pour la contrer. Toutes les spécialités chimiques ne sont pas concernées avec la même intensité. C’est la famille des IDM (inhibiteurs de la déméthylation), à laquelle appartiennent les triazoles, qui est la plus touchée. Et ce, alors que le deuxième traitement, dit « T2 », intervenant à « dernière feuille étalée », aujourd’hui pivot incontournable de la protection contre la septoriose, repose sur des produits contenant systématiquement une triazole.
Plus d’une souche de septoriose sur deux est désormais de phénotype TriHR, c’est-à-dire, hautement résistante à un ou plusieurs IDM. Et les souches résistantes à plusieurs modes d’action, qualifiées de MDR, continuent elles-aussi de progresser. Leur fréquence a atteint 14 % en 2018 !
Différences d’efficacité au sein d’une même région
Les travaux des instituts montrent une hétérogénéité spatiale de la structure des populations résistantes d’où une efficacité variable des spécialités utilisées au sein d’une même région. Ils révèlent également qu’en termes d’efficacité, les IDM, utilisés seuls, ne suffisent plus à protéger le blé, y compris lorsque plusieurs triazoles composent le programme.
Il est ainsi recommandé de les associer à un fongicide multisite ou à un SDHI (Inhibiteur de la succinate déshydrogénase). Mais attention, depuis 2015, des phénotypes résistants aux SDHI sont également régulièrement détectés. En 2018, 5 % des populations de septoriose analysées présentent des souches résistantes. Cependant, « en France, il n’y a toujours pas lieu de craindre pour l’efficacité des SDHI pour les traitements à venir ». Mais compte tenu de la progression rapide du phénomène dans d’autres pays européens, notamment en Irlande et en Angleterre, les instituts conseillent de limiter l’utilisation des SDHI à une seule application par saison, quelle que soit la dose. Objectif : limiter la pression de sélection.
Incertitudes à venir
Même si touchées par une lente érosion de leur efficacité, les triazoles restent des piliers de la protection fongicide, notamment prothioconazole, époxiconazole et metconazole. Ainsi, pour limiter la pression de sélection sur les fongicides, en particulier face aux souches TriHR, l’alternance des modes d’action est de mise, tout comme la diversification des molécules employées au sein d’une même famille.
Un casse-tête qui a pu se résoudre ainsi pour la campagne 2019 : association triazoles + SDHI + solution multisite. Mais qu’en sera-t-il à l’avenir ? La ré-évaluation au niveau européen de l’approbation de certaines substances actives va obliger à revoir les stratégies dès 2020. Ainsi, 2019 est la dernière campagne d’utilisation pour le propiconazole et 2020 est la dernière campagne pour l’époxiconazole. Enfin, le chlorothalonil n’a pas été réapprouvé et sa dernière campagne est aussi 2020. Seule solution pour faire face aux résistances et préserver les rendements : l’innovation !